Apprendre a dire non
Nous avons parfois dans notre entourage des personnes qui ne savent pas tenir debout toute seules, et qui s'accrochent aux autres comme a un rocher, souvent par manque de confiance en elles, parfois par lassitude ou par simplicité. Au moindre coup de vent, on les voit accourir vers nous, se plaignant inlassablement de leur condition et cherchant désespérément en nous la réponse ou la solution miracle qui réglera tous leurs problèmes.
Je ressens une immense compassion pour tous ceux qui souffrent, tous ceux qui vivent des périodes difficiles, parce qu'on traverse tous un jour ou l'autre des tempêtes dans nos vies et on est toujours heureux de pouvoir trouver une main amicale qui nous soutient, un regard bienveillant, ou une oreille attentive. C'est important dans ces périodes la de se sentir entourée et aimée.
De par ma nature et maintenant mon travail, je suis toujours heureuse d'apporter mon soutien a tous ceux qui le demandent, tous ceux qui en ont besoin, a tous ceux que j'aime, a tous mes amis, tous mes patients, mais aux autres aussi, bref a tout le monde quoi ... :D Je suis "née" pour ca en quelque sorte, c'est mon rôle, ma "mission" (Ouiiii me voila avec mon sabre laser bleu, moi, Grande defentrice de la veuve et de l'opprimé, la mère Theresa des temps modernes, la Jeanne d'arc venue de Malte pour sauver tout le royaume des francs (et des euros) tataaatatataaaa ta tatataaaa ta tatataaaa !!! muhahahaaa !!!)
humm pardon ... Je le fais donc volontiers, sans attente, ni arrière pensée, sans jugement, ni obligation. Je le fais avec tout mon cœur et rien d'autre. Bon ce n'est pas toujours une partie de plaisir pour mon interlocuteur car j'ai une fâcheuse tendance a être directe et franche, et après les chaudoudoux de circonstances pour réconforter une petite âme en peine, je donne gentiment un petit coup de pied aux fesses pour qu'elle ne reste pas bloquée dans une situation douloureuse, triste, inconfortable, stressante ... J'essaye de la pousser a s'en sortir très vite. Je n'aime pas voir les gens souffrir. sans doute parce que je sais ce que souffrir veut dire. J'ai juste envie de prendre une corde pour les tirer de toute cette boue dans laquelle ils s'enlisent. Ca me prend aux tripes alors j'explique, je challenge, je leur montre la situation sous différents angles, leur présente différentes options, différents chemins ... Et je les laisse choisir ensuite. Parce qu'au final, le choix leur appartient a eux, et personne ne peut prendre une décision pour autrui. Nous sommes responsables de notre propre chemin et je suis bien consciente qu'on ne peut sauver personne. Les super héros ca n'existe pas. (vlan, ca fout un coup hein ?!)
On ne peut sauver personne... et c'est la que j'en viens au titre de mon article. parce qu'on ne peut pas aider tout le monde non plus. Malgré nos bonnes intentions, malgré tout notre amour, malgré notre énergie, malgré tout le soutien que l'on souhaite apporter a celui qui souffre. Si il ne veut pas guérir, si il ne veut pas écouter ou agir, nos efforts sont vains et on se bat dans le vide, on se bat pour 2 mais ca ne marche pas. On s'épuise a nourrir l'autre de notre propre énergie. Mais on ne peut pas porter quelqu'un a bout de bras, même si c'est son enfant ou son parent, même si c'est son mari ou son frère, même si c'est son meilleur ami ou sa flamme jumelle. Il arrive un moment ou il faut savoir dire non.
Non. Je t'aime. mais non je ne peux plus t'aider. non je ne peux plus te soutenir. non je ne peux pas te laisser m'entrainer avec toi dans ce gouffre.
Car le danger a vouloir sauver l'autre, c'est qu'on a tendance a s'oublier. Ses souffrances deviennent les nôtres, et on s'embarque dans un cyclone qui ne nous appartient pas.
Il est extrêmement difficile de dire non. Parce qu'on nous a inculqué depuis des générations l'esprit de sacrifice. Parce qu'on n'a pas le droit de faire passer son propre bien être au détriment de ceux qui nous entourent. C'est interdit par la bonne morale. On nous a rabâché depuis des décennies partout qu'une bonne maman est celle qui se sacrifie pour ses enfants, qu'une bonne épouse est celle qui se sacrifie pour que son mari fasse carrière (bon heureusement ca évolue pas mal sur ce point) ... Nous sommes les dignes héritiers de l'apologie de l'abnégation totale. Et pour se dépatouiller d'un tel réflexe, y a du boulot !
Et pourtant, si on veut pouvoir continuer d'aider, de supporter, de se soutenir les uns et les autres, parce que c'est notre rôle d'humains, parce que l'on vit en communauté et que le fait même d'avoir une famille nous impose d'une certaine manière une "responsabilité" vis a vis d'eux. On ne peut le faire que si on a les 2 pieds bien ancres dans notre vie, que si on est fort et équilibré.
Nous sommes donc notre priorité. pas nos enfants, pas nos parents, pas nos partenaires. pas nos amis, pas notre travail. Nous d'abord. les autres après. Je sais combien cela sonne dissonant a nos petites oreilles bien éduquées.
Mais si on creuse un peu ... en tant que thérapeute, si je suis totalement a la ramasse, déséquilibrée et mal dans ma peau, comment puis-je aider un patient ? comment puis-je l'écouter attentivement alors que mon esprit est torturé ? comment lui donner des conseils avisés si je ne suis même pas capable de me sortir moi même de situations inconfortables ? On dit souvent que ce sont les cordonniers les plus mal chaussés, justement parce qu'ils s'oublient... mais si je vais chez un dentiste qui a les dents pourries, j'aurais moyennement envie de lui confier ma bouche ... si je vais chez un boucher végétarien, pareil, pas sure que je lui confie ma bouche - bon encore faut-il en trouver un hahaaha ! enfin vous avez compris mon raisonnement j'en suis sure ;)
Tout ca pour dire que dire non est un acte d'amour. Il vaut mieux dire non maintenant pour mieux dire oui plus tard, plutôt que dire oui tout de suite, sans être capable de tenir ce oui. Certaines personnes demandent beaucoup de soutien, d'attention, elles absorbent notre énergie, pas méchamment, pas consciemment, mais leur besoin est tel que nous étouffons a leur contact. Mais celui qui attend un sauveur ou un miracle dans sa vie ne pourra jamais être satisfait et vous asphyxiera avec ses insatiables besoins.
Dire non signifie se préserver de certaines vibrations négatives, et parfois c'est indispensable, vital.
Dire non, c'est aussi savoir reconnaitre ses limites. Comme je le disais plus haut, Superman n'existe pas même si il y a une part de lui en chacun de nous ;) Car il arrive que nous ne soyons pas suffisamment en forme pour être disponible aux autres, et puis parfois, ce sont les autres qui ont des besoins que nous ne sommes pas capable d'assouvir.
Dire non c'est tout simplement s'autoriser a être juste envers nous mêmes et envers les autres.
Alors, je dis OUI au NON !